A son excellence, L’ambassadeur de France en Tunisie, M. Boillon,
Si nous nous permettons de vous écrire ainsi aujourd'hui, c'est à la suite de votre première intervention à Tunis, intervention où vous vous êtes adressé au peuple tunisien par l'intermédiaire de ses journalistes.
Nous voudrions, par la présente, attirer votre attention sur certains points qui pour nous, peuple tunisien, sont essentiels, contrairement à ce que vous et vos maitres, semblez en droit de penser. Si vous souhaitiez que votre séjour en Tunisie soit entouré de sérénité et de bons rapports, non seulement avec les représentants du peuple mais avec tout le peuple tunisien, il apparait évident que vous n'avez pas eu beaucoup d'entendement.
Une journaliste vous a posé la question de savoir ce « que (vous pourriez) répondre aux préoccupations du peuple tunisien par rapport au comportement de la France durant la révolution ». Vous avez oublié votre fonction et avez répondu que cette question était un préjudice. Vous vous êtes même permis de traiter la question de "débile".
Sachez, cher monsieur, que la France, que vous représentez ici, à Tunis, a beaucoup à faire pour faire oublier, d'une part, son soutien inconditionnel à son ami Ben Ali pendant toutes ces années, mais, surtout, la position politique inadmissible qu'elle a soutenu pendant que nos jeunes mourraient et se battaient pour la liberté, l'une des valeurs pourtant inscrite dans la devise de votre patrie, monsieur.
Ainsi nos préoccupations vous semblent déplacées ? Et bien, c'est que nous allons avoir un problème, cher monsieur. Car, voyez vous, Le peuple tunisien n’a jamais été un peuple imbécile, contrairement à ce que vous pourriez croire. Et si nous avons connu le malheur et la disgrâce de vivre sous un dictateur « ami » de la France, cela ne veut pas dire que nous ne savons réfléchir, comprendre et surtout nous prononcer. Cela signifie "juste", qu'avec l'accord de votre Nation, l'on nous avait muselé et dépouillé d'une grande partie de nos droits, dont celui de s'exprimer. Mais ne prenez pas la conséquence pour la cause et sachez que nous vous voyons pour ce que vous êtes, très cher monsieur.
Votre attitude pleine de mépris et d'arrogance, vous donne l'outrecuidance de parler ainsi à une journaliste tunisienne qui exprimait la question principale qui occupe le peuple tunisien quant à l'avenir de ses relations avec la France, a choqué plus d'une personne. Si c'est ainsi que se comporte le représentant de l'État français en Tunisie, nous craignons le pire pour l'avenir de nos échanges, monsieur. Mais pouvions nous attendre autre chose de la part d'un représentant dont le gouvernement n'a toujours pas présenté d'excuses claires pour avoir offensé la dignité d'un peuple ni n'a été blâmé pour entretenir des relations d'affaires avec un tyran ?
Cher monsieur, votre jeunesse n'est qu'apparente, vos actes semblent venir d'un monde si ancien, si vieux. Pensiez vous réellement pouvoir vous comporter comme ces soldats ardents et insultants de la période colonialiste ? Il semblerait que vos maîtres n'ont toujours pas compris quelle est la période historique qui s'ouvre en ce moment en Tunisie. Mais il est certain que les piètres performances de notre ancien ministre des affaires étrangères doivent y être pour quelque chose. Allez donc expliquer, cher monsieur, que nous ne sommes pas au début d'un nouveau colonialisme, non, nous sommes à l'aube de grands changements, et cette attitude française sera sévèrement punie à chaque fois qu'elle aura le malheur de réapparaitre, comprenez le bien.
Sachez que la volonté du peuple, aujourd'hui, Monsieur l’Ambassadeur, est de vous dire, tout simplement, "dégage". Vous avez réussi avec votre comportement dédaigneux à tirer le pire du peuple tunisien, connu pourtant pour son accueil légendaire et sa générosité. Vous avez, en moins d'une semaine, fait échouer votre mission. Vous pouvez partir maintenant. Et dommage pour cette belle carrière prometteuse que vous vous étiez préparée et imaginée, vous saurez certainement tirer une leçon diplomatique de ce passage éclair dans notre beau pays.
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